Fati - Dra

La fraternité par le lien de sang

Le terme "fati-dra" signifie littéralement "mélange de sang" en malgache et désigne un rituel de fraternité ou de serment solennel scellé par le sang, unissant deux personnes ou deux familles par des liens symboliques et éternels.

Le sultanat de Mayotte avait réalisé un pacte de fati-dra avec le sultanat de Boina à Madagascar, au nord-ouest de l'île. Ce pacte de sang avait été conclu entre le sultan Andriantsoly de Mayotte et le sultan Tsialana du Boina, un royaume sakalava situé dans la région de Mahajanga. Ce fati-dra symbolisait une alliance politique et militaire entre les deux dirigeants pour renforcer leurs relations et s’entraider face aux menaces extérieures, notamment celles des autres sultanats et des puissances coloniales qui convoitaient les îles de l'océan Indien.

Cette alliance a eu un impact notable sur la culture et les échanges entre Mayotte et la côte nord-ouest de Madagascar. Elle a également permis un rapprochement culturel, avec des influences sakalava qui ont marqué les traditions et les lignages de Mayotte. Le pacte de fati-dra entre Mayotte et Boina est un exemple marquant de la manière dont les pratiques rituelles et culturelles de l'océan Indien étaient employées pour forger des alliances et assurer la sécurité et la stabilité des territoires insulaires dans un contexte d’instabilité politique.

Le Fati-Dra : un symbole de fraternité et de paix

En somme, le Fati-Dra est bien plus qu’un simple rituel. Il représente l’essence même de la fraternité et de l’humanité pour les Malgaches. Il rappelle l'importance des liens humains qui transcendent la famille biologique et souligne l'idéal d’une société unie et solidaire.

Les Rituels du Fati-Dra

Le rituel de Fati-Dra varie selon les régions de Madagascar et les clans. Cependant, le processus suit généralement une structure similaire, comprenant plusieurs étapes cérémonielles et une invocation des ancêtres et des esprits pour bénir l’alliance.

  1. Préparation du rituel : Les participants au Fati-Dra, souvent deux personnes ou deux familles, se réunissent dans un lieu sacré ou sous la supervision d’un aîné ou d’un prêtre. Ils prononcent des vœux d’engagement et de fidélité mutuelle.

  2. Échange de sang : L’échange de sang est au cœur du rituel. Traditionnellement, une petite incision est faite sur la main ou le bras des participants, et les gouttes de sang sont mélangées symboliquement. Parfois, ce mélange est consommé avec des boissons rituelles pour sceller l’engagement.

  3. Serment et bénédiction : Les participants prononcent ensuite un serment, souvent en invoquant Dieu ("Andriamanitra") et les ancêtres ("razana"). Le Fati-Dra devient alors un lien sacré, car rompre ce serment est perçu comme un acte de trahison envers les ancêtres eux-mêmes, avec des conséquences spirituelles graves.

  4. Marque symbolique : Dans certaines versions du rituel, une marque, souvent un bracelet ou un tatouage, peut être portée par les participants pour rappeler leur engagement mutuel.

Le Fati-Dra est un précieux témoignage de la manière dont la culture malgache perçoit la loyauté et le respect des engagements. En dépit des changements sociaux, le Fati-Dra reste un puissant symbole pour les Malgaches, leur rappelant l'importance des liens communautaires et de la fidélité aux promesses faites.À Mayotte, cette pratique existe également. En témoigne l’expression « u funga unanya ». Elle était très courante jusqu’à ces dernières décennies. Les liens établis ainsi demeurent des liens solides et étroits même pour les descendances.